Breakpoints et cut off épidémiologique des Candida.

E. Dannaoui
Parasitologie-Mycologie, Service de Microbiologie, Hôpital Européen George Pompidou, Paris, France 

Il existe actuellement des techniques de référence pour la détermination in vitro de la sensibilité des champignons aux antifongiques (AFST) qui permettent d’obtenir des valeurs fiables de Concentration Minimale Inhibitrice (CMI). Ces techniques développées soit par le CLSI (Clinical Laboratory Standards Institute) aux USA [1], soit par l’EUCAST (European Committee on Antimicrobial Susceptibility Testing) en Europe [2] sont robustes et reproductibles et permettent donc la comparaison et l’agrégation des CMI provenant de différentes sources.

L’analyse de la distribution des CMI pour chaque espèce et chaque antifongique permet de définir les « Epidemiological Cutoff Values » (ECOFFs pour les Européens ou ECVs pour les anglo-saxons). L’ECOFF est la valeur de CMI qui identifie la limite supérieure d’une population de souches sauvages. Une souche est définie comme sauvage pour une espèce donnée par l’absence de mécanisme acquis de résistance à un antifongique donné. Les ECOFFs sont déterminés à partir de l’histogramme de distribution des CMI soit par inspection visuelle, soit par des méthodes mathématiques. L’ECOFF représente une caractéristique de la population de souches sauvages et ne dépend donc pas de l’origine géographique, de l’hôte (humain, animal, environnement) ou de la période de recueil des souches. Cette valeur est l’un des paramètres (parmi d’autres) utilisés pour la définition des seuils de sensibilité cliniques (Clinical Breakpoints – CBPs) et représente un indicateur sensible de l’émergence de résistance microbiologique dans les études de surveillance épidémiologique. Actuellement, les ECOFFs ont été déterminés pour de nombreuses espèces de Candida et de nombreux antifongiques, par l’EUCAST (http://www.eucast.org) et par le CLSI [3-6].

Les CBPs permettent l’interprétation des CMI et donc la catégorisation des souches en Sensible – Intermédiaire – Résistant. Ces seuils ont pour but d’avoir une pertinence clinique et non pas épidémiologique ou mécanistique. Une souche est considérée comme sensible ou résistante lorsque le niveau d’activité antifongique est associé à une probabilité importante, respectivement, de succès ou d’échec thérapeutique. Il n’y a pas de relation formelle entre ECOFF et CBP. La détermination des CBPs est faite par des comités d’experts et intègre de nombreux paramètres tels que la pharmacocinétique de l’antifongique, l’ECOFF, des données expérimentales chez l’animal, les résultats des études cliniques, etc. En fonction de nouvelles données, les CBPs peuvent donc être révisés au cours du temps. Par exemple, très récemment, les CBs du fluconazole et des échinocandines ont été largement révisés par le CLSI [7, 8]. Dans certains cas, comme pour la caspofungine pour laquelle il existe une grande variabilité inter-laboratoire [9], une autre molécule peut être utilisée comme marqueur de classe [10].

 

Références

 

1.         Clinical and laboratory Standards Institute (CLSI). 2008. Reference method for broth dilution antifungal susceptibility testing of yeasts; Approved standard - third edition. CLSI document M27-A3. Clinical and Laboratory Standards Institute, Wayne, Pa.

2.         Arendrup MC, Cuenca-Estrella M, Lass-Florl C, et al. EUCAST technical note on the EUCAST definitive document EDef 7.2: method for the determination of broth dilution minimum inhibitory concentrations of antifungal agents for yeasts EDef 7.2 (EUCAST-AFST). Clin Microbiol Infect 2012; 18:E246-247.

3.         Castanheira M, Messer SA, Rhomberg PR, et al. Isavuconazole and nine comparator antifungal susceptibility profiles for common and uncommon Candida species collected in 2012: application of new CLSI clinical breakpoints and epidemiological cutoff values. Mycopathologia 2014; 178:1-9.

4.         Espinel-Ingroff A, Pfaller MA, Bustamante B, et al. Multilaboratory study of epidemiological cutoff values for detection of resistance in eight Candida species to fluconazole, posaconazole, and voriconazole. Antimicrob Agents Chemother 2014; 58:2006-2012.

5.         Pfaller MA, Espinel-Ingroff A, Bustamante B, et al. Multicenter study of anidulafungin and micafungin MIC distributions and epidemiological cutoff values for eight Candida species and the CLSI M27-A3 broth microdilution method. Antimicrob Agents Chemother 2014; 58:916-922.

6.         Pfaller MA, Espinel-Ingroff A, Canton E, et al. Wild-Type MIC Distributions and Epidemiological Cutoff Values for Amphotericin B, Flucytosine, and Itraconazole and Candida spp. as Determined by CLSI Broth Microdilution. J Clin Microbiol 2012; 50:2040-2046.

7.         Pfaller MA, Andes D, Diekema DJ, et al. Wild-type MIC distributions, epidemiological cutoff values and species-specific clinical breakpoints for fluconazole and Candida: time for harmonization of CLSI and EUCAST broth microdilution methods. Drug Resist Updat 2010; 13:180-195.

8.         Pfaller MA, Diekema DJ, Andes D, et al. Clinical breakpoints for the echinocandins and Candida revisited: integration of molecular, clinical, and microbiological data to arrive at species-specific interpretive criteria. Drug Resist Updat 2011; 14:164-176.

9.         Espinel-Ingroff A, Arendrup MC, Pfaller MA, et al. Interlaboratory variability of Caspofungin MICs for Candida spp. Using CLSI and EUCAST methods: should the clinical laboratory be testing this agent? Antimicrob Agents Chemother 2013; 57:5836-5842.

10.        European Committee on Antimicrobial Susceptibility Testing. Anidulafungin: Rationale for the clinical breakpoints, version 2.0. http://www.eucast.org 2013.